COVID, Pandémie Story
Elle est prof en région Parisienne, il voyage en Chine, ils ne se connaissent pas mais pour toujours ils seront liés, chaînons inconscients d’une grande histoire mondiale !
C’est un soldat. Un occidental. Un blanc. Il est loin de chez lui, sur une terre lointaine et hostile. Il marche dans une jungle. Profonde, obscure. Le soldat progresse vers un village indigène. Il travaille pour une société qui veut exploiter le sous-sol de cette forêt. On y a découvert un minerai rare qui rapportera une fortune.
Mais il y a un problème. Les indigènes. Ils vivent juste là où se trouve le minerai. Il faut qu’ils partent.
Deux solutions, soit ils acceptent de déménager en échange de quelques pacotilles, soit…on les tue.
Le soldat n’est pas seul. Ils sont une centaine, équipés et lourdement armés. Ils progressent vite. Ils ne cherchent même pas à camoufler leur présence. Les indigènes les entendent, ils vont se préparer ? Et alors…avec leurs arcs et leurs pauvres lances, ils ne font pas le poids.
Le village est là-bas, dans une clairière, on distingue les feux qui brûlent dans la nuit devant les maisons en terre.
Cette fois-ci, les soldats n’ont pas apporté de pacotilles. Il n’y aura pas de négociations. Ils ne sont plus qu’à une cinquantaine de mètres de la clairière.
Le silence.
Et soudain, le fracas des armes. Cent fusils crachent la mort en même temps. Le massacre commence.
Lire la suiteDans la suite de l’histoire, notre soldat, qui va devenir le héros, sympathise avec les indigènes. Contrairement aux autres soldats, ils entament un dialogue. Il s’intéresse à leur mode de vie, à leur religion. Il apprend des rudiments de leur langue. Et il a des remords.
Il est partagé entre la fidélité à ses employeurs, une promesse de richesse et la découverte d’une nouvelle vie, d’un nouveau peuple.
Finalement, il va passer de l’autre côté. Il trahit les siens et devient le frère des indigènes. Il arrive parfois qu’il tombe amoureux d’une belle indigène…
Vous connaissez cette histoire bien sûr… elle en rappelle tellement…
C’est Pocahontas ! C’est Danse avec les loups ! C’est La flèche brisée… C’est Lawrence d’Arabie, c’est Apocalypse Now, c’est Dune, …et c’est Avatar !
Cette histoire commence avec l’humanité. L’homme a depuis toujours, et partout, tenté de s’emparer du village d’à côté, de la ville, du pays, pour ses terres, ses richesses, ses minerais… Mais les Européens et les Américains, après avoir colonisé tous les continents, ont commencé à en raconter une nouvelle version.
Elle se déroule chez les conquistadors en Amérique du Sud, les colons en Afrique, les soldats anglais dans le monde arabe ou en Inde et plus proche de nous, chez les pionniers qui s’élançaient à travers les plaines du continent nord-américain.
Cette version de l’histoire est celle de la rédemption, avec son héros qui prend fait et cause pour les indigènes. Et c’est la version reprise par James Cameron avec Avatar.
Mais vous allez le voir, Avatar, pétri de bons sentiments et de louables intentions, tombe dans les travers de ce qu’on pourrait appeler : « le complexe du petit blanc ».
Petit rappel de la situation au début d’Avatar.
La terre lointaine et inhospitalière où évolue notre héros, c’est la planète Pandora sur laquelle on a découvert un minerai inconnu sur terre, l’unobtanium. On peut en faire une source d’énergie et ça tombe bien car l’énergie, sur terre, on en manque.
Une société privée envoie donc des vaisseaux spatiaux sur Pandora pour exploiter cette nouvelle richesse. Elle envoie aussi des soldats pour mater les indigènes récalcitrants à l’exploitation de leur terre par des étrangers venus les piller.
Les indigènes de Pandora, sont les Navi.
Le héros blanc, le soldat qui va basculer du côté des Navi, c’est un dénommé Jake.
Un mot sur les indigènes d’Avatar. Ils sont beaux, fins, athlétiques, souples et agiles. Ils dégagent aussi une aura sensuelle, sexuelle.
James Cameron s’inspire clairement des Indiens d’Amérique du Nord. Les hommes libres des hautes plaines ! Ils montent à cheval, se couvrent de peinture de guerre, ils portent des coiffures à l’iroquoise. Ils sont armés d’arcs et des flèches, face aux colons qui eux, ont des armes à feu.
Ils pratiquent aussi une forme de Chamanisme. Ils croient en une entité divine qui est présente en toutes vies, animale ou végétale. Ils ont donc un immense respect pour la nature qui les entourent et dont ils font partie. Ils sont un élément du grand tout. Quand ils tuent un animal, ils le remercient et s’excusent de lui avoir pris sa vie.
Il se dégage d’eux une grande douceur…et une grande force. Ce sont les gentils.
En comparaison, les envahisseurs, les occidentaux, sont, pour la plupart, leur parfaite antithèse. Ils sont cupides, violents, corrompus. Ils ne respectent pas la nature qu’ils détruisent pour assouvir leur soif de richesse.
Ce sont…les méchants.
A noter que James Cameron est influencé par les westerns des années 60. L’Amérique traverse alors une période de contre-culture. C’est l’époque de la révolution hippie, de la défense des droits civiques et de la lutte contre l’impérialisme américain, notamment au Vietnam. Cette philosophie, ces combats, inspirent les musiciens, les écrivains et les cinéastes.
Et au cinéma, les Indiens des westerns étaient encore représentés comme des sauvages assoiffés de sang, pas très futés puisqu’ils couraient vers la carabine de John Wayne qui pouvait tranquillement les descendre par dizaine. L’indien d’Hollywood était alors de la chair à canon au service des aventures des cow-boys et des pionniers.
Avec les années 60, et ses préoccupations humanistes, l’indien n’est plus un guerrier sanguinaire mais il devient un bon sauvage, sage et stoïque. Et face à lui, les braves pionniers deviennent eux, des brutes meurtrières.
Le premier western à inverser les rôles, c’est « La flèche brisée » qui raconte l’amitié improbable entre un chef Apache et un soldat américain, qui au passage tombe amoureux d’une jeune et jolie indienne…
Dans Avatar, le soldat américain c’est donc Jake.
C’est lui cet homme blanc, européen, qui passe chez les indigènes. Il est venu pour les combattre et finalement il apprend leurs coutumes, leurs mœurs et se détourne de la civilisation qui l’a vu naître.
Cette histoire n’est d’ailleurs pas juste un fantasme ou une bonne idée de scénario. Elle est réellement arrivée, et plusieurs fois. On connaît des précédents dans l’histoire de l’Ouest américain. Des enfants et des femmes enlevés par les Indiens. Ils ont vécu complètement intégrés à la tribu pendant des décennies avant de revenir à la civilisation.
Ces récits fascinaient les européens, qui s’en sont rapidement inspirés dans des livres, des pièces de théâtre, des chansons… C’est aussi le genre d’histoire qu’adore le cinéma.
Cameron cite lui-même ses références. Pour Avatar, il s’est inspiré de « Danse avec les loups », « La forêt d’émeraude », « Médecine Man », et « Lawrence d’Arabie ».
Dans toutes ces histoires le héros blanc, en fréquentant les indigènes, en comprenant leur culture, découvre une part de lui-même qu’il ne soupçonnait pas.
Il se révèle en abandonnant la civilisation. Et bien sûr il ne faut pas oublier…l’amour.
L’histoire de Jake ne serait rien sans l’amour qui l’unit à la belle princesse Navi, Neytiri. Non seulement elle l’initie à la vie des Navi, mais elle est l’élément déclencheur de la métamorphose de Jack. C’est parce qu’il éprouve des sentiments pour elle, qu’il change de camp.
L’histoire entre Jake et Neytiri est calquée sur celle de Pocahontas. Une princesse indienne qui sauve la vie du capitaine John Smith en empêchant un chef indien de le mettre à mort.
Inspiré d’une histoire vraie, Pocahontas est un mythe crucial dans la psyché américaine. Il nous offre le rêve d’un monde métissé et harmonieux.
Ce mythe, cette utopie, a été repris de nombreuses fois au cinéma avec la version de Pocahontas de Disney, celle de Terrence Malik dans « Le nouveau monde », ou encore John Carter, un film de science-fiction qui raconte l’histoire d’un soldat de la guerre de sécession qui tombe amoureux…d’une martienne !
James Cameron admet s’en être inspiré…
Avatar veut bien faire. Il dénonce l’écocide et l’impérialisme. Il promeut le respect, la fraternité, l’amour. Mais il y a un petit problème. Cameron utilise des ficelles narratives qui desservent son propos. La trajectoire de Jake coche toutes les cases d’un cliché un peu encombrant…
Reprenons les références cinématographiques de Cameron.
Le blanc/européen intègre la communauté indigène. Il tombe amoureux, épouse la princesse locale et adopte un nouveau mode de vie.
Mais pas seulement. Il rejoint aussi leur lutte contre l’oppression. Il va se battre à leurs côtés contre les colons sanguinaires.
Son intervention est même déterminante dans l’avancée de cette lutte. Le récit suggère que sans l’aide du héros, la situation en serait restée au point mort.
Jake suit cette trajectoire. Il embrasse la lutte des Navi. Il monte une armée et il repousse l’envahisseur. Il est le moteur central de la résistance. Sans lui, les braves sauvages se feraient tous massacrer.
Le sauveur blanc a beau clamer haut et fort ses bonnes intentions il n’empêche que sa figure est problématique.
En devenant le principal porte-voix de cette contestation, il finit par devenir le reflet inversé du colon blanc. Sans lui, les indigènes seraient incapables de se prendre en charge.
Ils sont passifs. Ils sont purs, incorruptibles, des êtres en totale osmose avec la nature mais du coup, ils perdent en profondeur et en individualité.
Ils sont réduits au symbole d’une humanité innocente qu’il faut absolument protéger.
Le film reprend cette image malaisante de l’indien martyre. Le sauvage magnifique mais sacrifié. Une éternelle victime. Il n’agit pas, il subit. Il est incapable de se sauver lui-même.
Même la princesse Neytiri, celle qui devient la compagne de Jake, même elle ne décide de rien. Elle n’est finalement qu’un ressort technique au service de la quête personnelle de Jake.
Une fois qu’ils se sont unis, elle a joué son rôle, elle a intronisé Jake. Ensuite, elle est mise en retrait du récit.
Lorsque son père, le chef de la tribu, est sur le point de mourir et qu’il lui demande de veiller au bien être de son peuple, on s’attend à ce qu’elle devienne chef à son tour. Mais non, c’est Jake qui hérite de cette charge.
Pourquoi d’ailleurs ?
Pourquoi Jake devient-il le leader des Navi ?
Il n’a pas le charisme, c’est un personnage assez creux. Il est gentil, il est bon, un peu bête, il le dit lui-même, il n’est pas un génie. Il ne réfléchit pas, il suit ce que son instinct lui indique comme étant le chemin le plus juste.
Pourtant, on peut rendre ce type de personnage plus complexe.
Par exemple Lawrence d’Arabie. C’est le sauveur blanc de la cause arabe, certes, mais habité par de profonds tourments intérieurs. Il doit trahir, soit ses nouveaux amis, soit la couronne. Il sort du conflit perturbé. Ses convictions profondes, son attachement à la monarchie et à l’Angleterre, ont fondu face à la réalité : l’autre, l’ennemi, est un être humain respectable.
Le héros de Dune de Frank Herbert, le jeune Paul Atréide, est lui aussi un être tourmenté, il doute. Il prend la tête des Fremens un peuple du désert, il les libère de l’oppression d’un terrible empereur mais, il provoque par la même occasion un génocide. Il devient ce qu’il combattait, un tyran.
Jake manque donc de caractère, mais en plus, il ne sait pas faire grand-chose…
Pour justifier qu’il devienne le chef de la rébellion, on pourrait lui attribuer des connaissances spéciales. Il pourrait être un médecin dévoué, un militaire hors pair ou un scientifique ingénieux… Il pourrait avoir acquis des connaissances techniques dont les indigènes sont dépourvus.
Non. Rien de tout cela. La seule chose que Jacke sait faire, c’est la guerre. Il est soldat. C’est tout. Et ce n’est même pas un très bon soldat. A y regarder de plus près, lors de la bataille finale, il n’est pas bon stratège et s’il n’était pas aidé par l’esprit divin de Pandora, on y reviendra, et bien il aurait sans doute perdu la guerre…
Alors pourquoi devient-il le héros ?
Jake est catapulté héros pour une raison toute simple. Il est choisi par Dieu…rien de moins…
La planète Pandora est animée par un esprit divin qui se nomme Enya.
Enya est la conscience de la planète, elle est en contact avec tous les êtres vivants qui l’habitent et c’est elle qui va désigner Jake. A deux reprises, Enya envoie des signes.
Au tout début du film, la princesse Navi s’apprête à tuer Jake mais elle interrompt son geste parce que, ô miracle, un genre de pistil sacré, un être mi végétal mi animal, virevolte dans les aires avant de se poser sur lui et ainsi le protéger. Ce petit être a été envoyé par Enya.
Autre miracle, Jake dompte facilement un immense oiseau, féroce, un animal craint et respecté par les Navis. Or, pour dompter cet animal, il faut qu’il accepte d’être dominé. C’est encore Enya qui lui a intimé de se plier à la volonté de Jake.
Dès lors, il est écouté et respecté des Navis.
Désigné par Dieu, il devient le messie.
Et puis, n’oublions pas que Jake ne remporte la victoire finale qu’en adressant une prière à Enya. Elle lui répond presque immédiatement, et ce ne sont plus les Navis, mais la planète entière qui déploie ses forces contre l’occupant. Animaux et plantes entrent dans l’action, viennent au secours des Navi et repoussent l’envahisseur.
Notons au passage une définition du mot Avatar, qui dans la religion hindoue désigne l’incarnation charnelle de Vishnou, une des divinités les plus importantes de l’hindouisme.
Jacke est l’incarnation du Dieu de Pandora.
Et ce Dieu ne choisit pas un Navi mais bien notre soldat blanc…
Et là aussi nous avons un beau cliché.
Celui du blanc vu comme un Dieu par les Indiens.
Le conquistador Cortés arrive au Mexique en 1518. On raconte que les Aztèque qui habitaient la région, l’ont pris pour une réincarnation de leur Dieu « Serpent à plumes ». Avec son armure, ses armes, sa barbe, il ne pouvait qu’être une incarnation du divin. De plus, Cortés et ses hommes montaient des chevaux, des animaux inconnus des Indiens à l’époque et qui ont renforcé le caractère sacré des conquistadors.
Cette histoire, devenue une légende, a été entretenue par les Espagnols afin de préserver leur autorité.
De là est née l’idée que pour tous ces sauvages, les blancs étaient des Dieux.
Et 5 siècles plus tard, Hollywood persiste…
Texte : Claudia Valencia / Voix : Michel Elias
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