OLENA ZELENSKA, Pas sans elle – Par Valérie Trierweiler

Olena assure qu’elle découvre cette allocution en même temps que tous leurs compatriotes. Il aurait tout simplement oublié de lui dire ! 

Enfin, ce n’est pas tout à fait de cette façon que les choses se sont passées. Lorsqu’il a évoqué, pour la première fois, devant elle, cette envie d’être candidat, elle lui a aussitôt rétorqué : « Mais tu es devenu fou ! ». 

Oui c’est vrai, elle le reconnaît elle lui a parlé de façon très agressive. Bref, elle l’a… engueulé !

Ce n’était pas leur projet commun, pas sa vision à elle du couple ou de la famille. Et il n’était pas encore question de guerre à ce moment-là. Mais Olena Zelenska se doutait bien que leur vie s’en trouverait profondément modifiée, que c’en serait terminé de leurs parties interminables de rigolade.

Mais puisque nous parlons de rigolade, le plus drôle est que c’est bien elle qui l’a propulsé à la tête de l’Ukraine. Et sans préméditation !

Comment ? En écrivant elle-même le scénario de la victoire !

Zelenski, on le sait, n’était autre qu’un acteur comique populaire dans la série à succès « Serviteur du peuple ».

Imaginez, il joue le rôle d’un professeur qui devient, de façon quasi accidentelle, Président de la République d’Ukraine. 

Grâce à cette série humoristique, il devient le chouchou des Ukrainiens. 

Il n’en fallait pas plus pour que, de ce succès naisse l’ambition de devenir réellement Président de la République !

Cette fois, l’épouse ne rigole plus. 

Elle ne voit pas, dans cette perspective, l’humour que l’on retrouve dans la série. 

Elle préfère la fiction, cette réalité ne lui plait pas. 

Mais alors pas du tout ! Elle y est même totalement opposée ! 

Mais c’est pourtant elle qui a imaginé ce scénario prophétique, qui peu à peu s’est instillé dans la tête de son mari.

Olena comprendra rapidement que Volodymyr ne changera pas d’avis. 

Les dés sont jetés. 

Le candidat créé son parti politique nommé comme le titre de la série :« Serviteur du peuple ». 

Et c’est parti !

Elle accepte de le suivre, ils ont toujours tout fait ensemble.

Depuis leur début, la stratégie Zelenski se conjugue systématiquement à deux, c’est un « double je ». 

Elle ne le quitte plus. Ils ne se quittent plus. Elle écrivait les scénarios, elle rédige désormais les discours de campagne de son candidat de mari. 

La blonde Olena ne voulait pourtant pas apparaître dans la lumière. Comme pour la série, elle veut rester en retrait. Le premier rôle c’est lui, elle ne veut même pas d’un second.

Être sa principale conseillère lui sied parfaitement. IIls ne sont pas seulement mari et femme mais aussi partenaires. Ils forment une équipe, sont liés dans toutes les occasions de la vie. Ils se connaissent depuis si longtemps. Depuis tant de temps.

Ces deux-là sont originaires de la même ville de KryvyÏ Rih, du même quartier, de la même école. 

Ils ont tout juste 17 ans lorsqu’ils se rencontrent, et depuis n’ont pas cessé de cheminer ensemble. 

Ils fréquentent la même fac. Elle, en étude d’architecture, lui en droit. 

Des études qui ne leur serviront pas beaucoup !

Mais leur histoire n’a pas non plus été une évidence. 

Olena est tombée amoureuse d’un autre. Il lui a fallu quelques années pour se rendre compte que Volodymyr était bien l’homme de sa vie. Et il a fallu au futur Président des trésors de séduction pour récupérer celle qu’il a toujours aimée.

Ensemble, ils aiment refaire le monde et rire. 

Ils s’amusent tellement l’un avec l’autre qu’ils décident d’en faire leur métier. Ils envoient leurs études balader. 

Olena se met à écrire des sketchs humoristiques, Volodymyr les interprète et c’est ainsi qu’ils remportent un prix qui les propulsent vers le succès. 

Ensemble toujours, ils créent leur maison de production qui porte le nom de leur quartier. Entre-temps, ils se sont mariés. Ils ne renoncent à rien, ont un premier enfant. 

Leur série « Serviteur du peuple » cartonne, tout leur réussit.

Jusqu’à l’élection de Volodymyr. 

Jusqu’à l’offensive russe. 

Jusqu’à la guerre. 

Jusqu’à ce 24 février 2022.

Après l’élection, à quarante-quatre ans Olena Zelenska décide d’endosser le costume de première dame. La guerre ne la fera pas dévier, son mari a besoin d’elle.

Volodymyr dit d’elle : « Elle est mon amour, elle ma meilleure amie, elle est ma force vitale ». Ils se soutiennent mutuellement. La guerre ne fera que renforcer leur couple et leur complicité. Ils forment un duo invincible. 

Ses débuts à elle s’avèrent timides. Peu à peu, elle prend de l’assurance. Le conflit la transforme, l’adversité la façonne. 

 « La situation nous oblige à faire un saut en dehors de notre zone de confort. Rester dans le confort serait amoral » dit-elle.

Elle se souvient du déclenchement de la guerre. 

De ces bruits étranges, ressemblant à des explosions en pleine nuit. 

Il était quatre heures du matin. 

A ce moment-là, elle préfère penser qu’il doit s’agir de feux d’artifices. Comment imaginer que cela puisse être la guerre ? 

Olena reconnaît ne pas avoir compris tout de suite que le feu s’abattait sur eux. Lorsqu’elle retrouve son mari, déjà habillé, dans la pièce d’à côté, il lui dit seulement ces quelques mots d’un ton grave : « Cela a commencé ». 

Cette fois, elle comprend que plus rien ne sera jamais comme avant. 

C’est la dernière fois qu’elle voit son mari en veste et chemise. 

Dès le lendemain il ne portera plus que cette tenue de guerre vert kaki que nous lui connaissons.

Mais elle ignore encore qu’elle va devoir être séparée de lui plusieurs mois. Ils sont une cible, l’un comme l’autre. Lui la première, elle la seconde. Et puis, il y a les deux enfants qu’il faut mettre à l’abri. 

Le couple refuse de quitter le territoire ukrainien. Les Etats-Unis leur ont bien proposé une exfiltration outre-Atlantique. Mais il n’est pas question pour eux d’abandonner le peuple ukrainien.

Les services de sécurité décident de leur trouver à chacun un refuge. 

A partir de ce moment-là, ils n’ont plus de contact l’un avec l’autre. Les voilà séparés, chacun en lieu sûr. Olena avec les enfants. Volodymyr avec ses généraux.

Deux mois, la séparation durera deux mois, avant que la première dame ne puisse regagner Kiev. 

Mais ils ne vivent toujours pas ensemble. Ils occupent des lieux distincts et secrets. 

Des rencontres sont organisées de façon totalement clandestines et sous haute sécurité.

Malgré le danger, Olena veut rester active. Elle se manifeste d’abord par le biais des réseaux sociaux. Une façon de s’exprimer sans encore trop s’exposer. “Aujourd’hui je ne paniquerai pas et ne verserai pas de larmes. Je serai calme et confiante. Mes enfants me regardent. Je me tiendrai à leurs côtés. Et aux côtés de mon mari. Et du peuple ukrainien”, écrit-elle sur Instagram le jour même de l’offensive russe.

Elle devient une figure de la résistance, lui un héros de guerre. 

L’un comme l’autre sait mettre son action en lumière, ils utilisent l’image comme un langage, la communication comme une action.

Olena qui avait toujours préféré l’ombre se retrouve elle aussi propulsée en première ligne.

​​Son compte Instagram a explosé. Près de 3,5 millions de personnes la suivent à travers le monde. 

Et le réseau social est devenu pour elle un instrument de communication politique puissant.

« Combien d’enfants vont-ils encore mourir ? » interroge-t-elle après une énième attaque russe. 

Elle tient le décompte précis des décès de petits ukrainiens. 

Elle raconte l’histoire de plusieurs de ces petits sacrifiés. Elle devient la mère éplorée de tous ces enfants morts comme de tous les orphelins. Elle incarne la mère de la nation.

Ses actions sont d’abord tournées vers les enfants en danger. C’est sa priorité. Lorsqu’elle revient à Kiew, elle visite des hôpitaux et des maternités. Elle rencontre des familles en deuil. 

C’est grâce à son action qu’une cinquantaine de petits malades du cancer ukrainiens sont accueillis en France pour y être soignés. 

Depuis, elle considère Brigitte Macron comme son amie.

Avec l’épouse du président turc Erdogan, elle se démène pour faire évacuer un orphelinat situé à Odessa. 

Nous sommes en octobre 2022. La ville est sous les bombes. Les enfants sont accueillis à Ankara. 

Olena remercie la Turquie pour ce geste d’amitié entre les deux pays. 

Elle dénonce aussi « la déportation massive des enfants ukrainiens dans les territoires occupés avec une adoption illégale par des familles russes ». Elle accuse encore la Russie de voler leurs enfants.

Mais en pleine guerre, elle est sur d’autres fronts, sur tous les fronts. 

Olena Zelenska se bat aussi pour que tous les musées du monde proposent des guides audios en langue ukrainienne. Une façon encore, de lutter pour la survie de son pays face au géant russe.

Elle est dans son rôle de première dame. 

Les choses évoluent lorsqu’elle rencontre Jill Biden, la femme du président américain, à la frontière ukrainienne. Certes, il est toujours question d’humanitaire mais l’idée de son déplacement aux États Unis commence à germer.

Lorsqu’elle quitte le territoire ukrainien pour la première fois depuis la guerre, c’est donc pour se rendre aux Etats-Unis où elle est accueillie comme un chef d’État ou presque. 

Nous sommes en juillet 2022, elle est reçue par le ministre des affaires étrangères puis par le couple Biden, avant de s’entretenir en tête-à-tête avec la First Lady américaine.

Mais plus étonnant encore, elle est invitée à s’exprimer devant le Congrès américain où elle prononce un discours très politique, un discours de chef de guerre. 

Elle est applaudie debout par l’ensemble du Congrès. 

Un discours que n’aurait pas renié son mari. Ils se connaissent si bien. A partir de ce moment, elle endosse un rôle nouveau. Elle devient l’émissaire de son pays, le prolongement de son mari.

Ce serait ridicule de parler d’atout charme comme certains aiment à le faire. Certes Olena Zelenska est une belle femme, mais elle devient dès lors une femme politique de premier plan. 

Elle l’est à la manière d’une Hillary Clinton lorsque Bill était Président. Hillary future ministre des Affaires étrangères, Hillary future candidate à la présidence de son mari. Mais n’allons pas si vite.

Les Ukrainiens savaient qu’Olena était une femme de cœur, ils découvrent une femme de tête. 

Sans mandat officiel, elle court le monde pour défendre son peuple. « Je dis oui à chaque fois qu’on me propose de défendre la cause ukrainienne » justifie-t-elle. Depuis le mois de septembre, elle dispose d’une Fondation qu’elle a créée pour récolter des fonds.

Il suffit de voir, lors de sa tournée européenne, le nombre de Unes de magazines. 

Elle accorde des interviews partout où elle passe. Dans chaque pays visité, elle mélange savamment l’humanitaire et le politique. 

A Londres, elle rencontre les familles ukrainiennes réfugiées dans un centre d’accueil.

Elle est accompagnée par le tout nouveau roi Charles III en personne.

La nature de ses posts devient de plus en plus politique. « Depuis que la Russie est passée aux tactiques de terreur énergétique, nous comprenons que cet hiver sera le plus dur de toutes les années d’indépendance » Elle n’oublie pas de remercier le Royaume-Uni pour « son soutien permanent ».  Son offensive politique se fait plus pressante.

A Londres, elle rencontre également le ministre de la Défense Ben Wallace. Comme une chef de guerre, elle remercie la Grande-Bretagne « premier pays européen à fournir à l’Ukraine des armes mortelles. »

La première dame écrit que « l’assistance britannique a permis non seulement de résister mais aussi de repousser l’ennemi. ». 

Elle s’adresse aussi aux députés du Royaume-Uni et de l’Irlande du nord à la chambre et n’y va pas par quatre chemins. 

Elle appelle à un tribunal pour les Russes criminels de guerre à l’instar du procès de Nuremberg. Elle sera entendue par le parlement européen qui, quelques mois plus tard, vote la création d’un tribunal pour Poutine.

Quelle autre first lady a pu tenir de tels discours ?

A chaque étape de sa tournée internationale, elle gravit un échelon. Il n’est plus seulement question de demandes d’aides en matière humanitaire. Ni même de fond. 

Ce qu’elle demande clairement désormais, ce sont des armes.

Certes, elle évoque la protection de ses concitoyens et des enfants en particulier d’où la nécessité de livraison d’armes et rapidement. La guerre dure depuis un an et la nécessité de renforcer le front militaire devient urgente.

Désormais, elle se place sur le champ diplomatique, elle mobilise les chefs d’État comme les opinions. 

Après un an de guerre, il faut maintenir la pression sur l’opinion. 

Pour certains, c’est un signe de fébrilité de Zelenski qui envoie sa femme dans une guerre de communication alors que les combats s’enlisent. 

Lorsqu’elle s’adresse devant les parlements, ce sont les opinions publiques qu’elle vise.

Une certaine lassitude s’installe et il faut mobiliser à nouveau, mobiliser toujours.

Fin décembre 2022, elle effectue une visite de trois jours en France. 

Elle sait que ses habitants, comme d’autres en Europe, souffrent de la crise énergétique. 

Pour convaincre les Français de ne pas se détourner de la cause ukrainienne, elle décrit la situation catastrophique de ses compatriotes.  

Brigitte Macron est à ses côtés, elle reste la première épouse de chef d’État qu’Olena a rencontrée trois ans plus tôt. « Elle m’a beaucoup soutenue et donnée de l’assurance » se souvient la première dame ukrainienne.

Ensemble, elles ont organisé ce « convoi de la vie » pour les enfants malades. Cette fois, les deux femmes vont visiter une école qui accueille des petits réfugiés.

Mais Olena vient surtout remplir une autre mission. Elle doit assister à la conférence internationale liée à la reconstruction de son pays, en présence d’Emmanuel Macron tandis que son mari apparaît à travers un écran.

Un milliard sera récolté à cette occasion ! 

Et ce n’est pas tout, Olena enchaîne une deuxième conférence, à Bercy cette fois sous l’égide de Bruno Le Maire, et en présence de 700 entreprises. Le soir, elle poursuit avec un gala au nom de sa Fondation afin de lever des fonds pour la reconstruction d’un hôpital. Elle sera largement entendue.

Le mois suivant, on la retrouve à Davos. 

Lorsqu’elle arrive devant le Forum économique mondial, elle joue d’abord sur la corde sensible. 

Elle évoque les tueries de Dnipro et Brovary avant de réclamer haut et fort des armes pour défendre son peuple. « Je demande quelque chose, que je n’aurais jamais cru demander. Je demande des armes pour mon pays ». 

C’est désormais son leitmotiv. Elle met sa vie en péril lors de chacun de ses déplacements pour la survie de son propre pays.

Bien sûr Olena Zelenska, comme toutes les first ladies n’échappe pas aux critiques. 

Les attaques ont fusé lorsque la toute nouvelle Première dame d’Ukraine, maquillée et sublimée, pose devant l’objectif de la célèbre photographe Annie Leibovitz.

On la découvre alors, en Une du magazine Vogue américain, assise sur les marches du palais présidentiel, en chemisier de soie et pantalon noir chic. Jusque-là rien de choquant. 

Mais en feuilletant le luxueux magazine de mode, on la retrouve glamour posant devant des carcasses d’avion ou encore enlacée avec son mari. 

On lui reproche alors de montrer une vision esthétique de la guerre alors que les Ukrainiens sont en grande souffrance.

Mais c’était au tout début de la guerre. 

Depuis Olena Olenska a appris, elle est devenue une icône ukrainienne, une ambassadrice sans ambassade mais portant l’étendard de son pays. 

Elle s’est parfaitement glissée dans un rôle qu’il lui a fallu inventer. 

Que fera-t-elle après la guerre ? Écrire à nouveau des sketches humoristiques est difficilement imaginable. 

Pas plus que revoir Volodymyr redevenir un acteur comique populaire. 

Olena l’a écrit tout récemment, elle a besoin de continuer à sourire. 

Selon elle, son mari, est « toujours le même gars qu’elle a connu à 17 ans » mais depuis un an, il sourit beaucoup moins. 

Alors implore-t-elle « Je veux sourire avec toi pour toujours ». 

Souhaitons-leur.

Texte & Voix : Valérie Trierweiler

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